Agrégé de mathématiques reconverti en anesthésiste-réanimateur, François Jaulin est aussi le fondateur de la SafeTeam Academy : le "Netflix des soignants". Nous l'avons invité lors de notre afterwork dédié au sujet de l'attractivité hospitalière.
Au fond de la cour, la nuit est tombée, mais quelques lumières sont encore allumées. En arrivant dans le bâtiment, on entend déjà quelques éclats de rire. Dans la salle de réunion du rez-de-chaussée, on peut distinguer quelques visages tournés dans la même direction.
L'afterwork a commencé : Aude et François, souriants, échangent quelques mots avec les participants assis en face d'eux. Dans le coin de la salle, Audrey s'arme de son appareil photo et commence à capturer quelques sourires.
Quant à moi, je m'installe discrètement sur le coin d'une table pour immortaliser ce moment à l'aide de mon clavier. La table-ronde suspend alors le temps qui passe, dans un moment d'échanges à bâtons rompus entre les 2 intervenants et les 15 participants, tous passionnés par le sujet : l'innovation frugale au service de l'attractivité hospitalière.
François commence par revenir sur ses débuts à l'hôpital, où il a été étonné que l'innovation fasse à ce point partie du plan de carrière des managers : "On leur demande d'innover en permanence, mais l'innovation pour l'innovation a un effet waouh complètement stérile".
Au contraire, sa définition de la frugalité embrasse davantage celle du jugaad, un mot issu du bengali qui désigne les moyens du bord, ou le fameux le système D. Pour lui, la frugalité peut passer par le détournement d'un usage assigné à un objet : qui n'a jamais calé une porte ou une chaise avec un bout de papier plié en douze ?
Aude rejoint François dans cette conception de la simplicité, en racontant une anecdote rapportée par sa maman, Blandine Canut, cadre de santé retraitée. Dans un service de pédiatrie, il est difficile de savoir à qui s'adresser quand on a une question. Les parents se relaient pour soutenir leur enfant à l'hôpital, et ne reviennent pas forcément à l'hôpital le même jour que l'infirmière qu'ils avaient croisée la dernière fois qu'ils sont venus. L'enfant peut lui-même avoir des difficultés à présenter "ses soignants" à ses parents. "J'ai une question à poser au médecin, mais je ne sais pas qui c'est." Alors... pourquoi ne pas commencer par le plus simple, avec un objet aussi banal qu'un trombinoscope géant à l'entrée du service ?
L'erreur est humaine.
Ce n'est évidemment pas le seul irritant présent dans le monde hospitalier, et François a concentré ses efforts sur un problème particulier : l'erreur. On connaît tous le dicton : "L'erreur est humaine." Mais dans le milieu de la santé, une erreur peut avoir des conséquences délétères sur le patient, ses proches sur l'établissement ou l'institution toute entière. La solution qu'impose le fonctionnement du système de santé aujourd'hui est austère : le silence. Quand on fait une erreur ou quand on manque d'en faire une, il ne faut surtout rien dire. Et la majorité des erreurs médicales sont des erreurs de communication.